mardi 4 novembre 2008

C'est à l'aube (3)


Le paysage défilait devant ses yeux qui pourtant ne voyaient rien, juste un vague flou. Le bruit de fond lancinant du TGV la berçait. Et les mêmes questions, inlassablement, s'imposaient à son esprit. Qui était-elle, elle, Valentine? Avait-elle, ne serait-ce qu'une unique fois dans sa vie, accompli quelque chose de bien? De VRAIMENT bien? Ses pensées furent interrompues par les vibrations de son mobile. Par réflexe, elle prit l'appel.

Sébastien.

-Val, t'es où? Qu'est-ce que tu fous?

-...Je pars.

-Mais où?!!...

-J'sais pas. Me chercher...Trouver...

-Mais quoi bordel? T'as pété un plomb? ...T'es où là?

-Dans un train.

-...

-Sébastien, laisse moi tranquille, laisse moi partir.

-Mais tu es complètement folle ma pauvre fille! Va! Va chercher ailleurs du mieux, du plus grand! Et trouve toi surtout!

Et il avait coupé, emporté par sa colère, le dernier fil qui le reliait encore à celle qu'il aimait.


Valentine ne bougea pas un cil et rangea son portable après l'avoir éteint. Elle ressentait de l'indifférence et en était la première étonnée.


* * *


çà faisait un moment que le petit garçon à ses côtés gesticulait, hurlait, la bousculait sans vergogne sans que la mère, assise en face, ne fasse preuve de la moindre réaction, malgré les soupirs et les regards réprobateurs des passagers alentour.

Valentine s'assoupit cependant, au milieu des cris aigüs du bambin.

Elle fut réveillée par une douleur sur son bras droit. L'enfant était en train de la pincer allègrement avec un sourire en coin. Elle sentit la moutarde lui monter au nez tandis qu'elle se dégageait de l'emprise des doigts du gamin.

-Tu vas te calmer mon bonhomme, c'est moi qui te le dis! dit-elle fermement.

La mère était toujours en face, et toujours inerte.

-Mais enfin, madame, dîtes quelque chose à votre fils! s'exclama un vieux monsieur visiblement excédé.

La mère sortit alors de sa léthargie pour glousser:

-Mais laissez-le donc! Il vit sa vie!

Brouhaha de stupéfaction dans le wagon.

Sans réfléchir, Valentine prit sa bouteille de 50cl d'eau minérale et la vida sur la tête du garçon qui se calma -on le serait à moins!- immédiatement, son petit visage exprimant à la fois la surprise et la frustration.

Les yeux de la mère lancèrent alors des éclairs et sa voix tremblante exhulta en direction de Valentine:

-Mais qu'est-ce qui vous prend? Vous êtes folle?!!!

Valentine ne put s'empêcher de sourire. Folle? Peut-être. C'était quand même la deuxième fois de la journée qu'on la taxait de déséquilibrée.

-Mais madame, je vis ma vie, moi aussi.

Le vieux monsieur éclata de rire et se mit à applaudir, suivi dans l'instant par le wagon entier.


Et c'est dans cette ambiance débridée, entre passagers hilares, une femme en colère et un petit garçon boudeur, que soudain, le premier coup de feu retentit...


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