jeudi 10 décembre 2009

Des tas de petits grelots qui savent rire

La première fois que je l'ai vu, c'était l'heure du chien-loup. Je ne distinguai pas la couleur de ses yeux, à peine les contours de son visage. Il semblait avoir cent ans, engouffré sous les draps blancs, ses membres comme désarticulés, et branché à des tuyaux.

Il m'apparut si petit.

On me murmura:"C'est l'oncle Edmond, il revient d'Amérique."
Il saisit son livre de chevet, qui devint bien plus tard le mien, et me fit signe de prendre place près de lui, une toute petite place sur les draps froissés.

Il me lut un extrait: "Tu regarderas, la nuit, les étoiles. C'est trop petit chez moi pour que je te montre où se trouve la mienne. C'est mieux comme çà. Mon étoile, ce sera pour toi une des étoiles. Alors toutes les étoiles tu aimeras les regarder. Elles seront toutes tes amies.
[...] Quand tu regarderas le ciel, la nuit, puisque j'habiterai dans l'une d'elle, puisque je rirai dans l'une d'elle, alors ce sera pour toi comme si riaient toutes les étoiles. Tu auras toi des étoiles qui savent rire! Et quand tu seras consolé (on se console toujours), tu seras content de m'avoir connu. Tu seras toujours mon ami. Tu auras envie de rire avec moi. Et tu ouvriras parfois ta fenêtre, comme çà, pour le plaisir...Et tes amis seront bien étonnés de te voir rire en regardant le ciel."

Il referma le livre et me fit un baiser sur le front. Il était déjà l'heure que je m'en aille.

Le lendemain on m'annonça que ma rencontre avec l'oncle Edmond aura été brève, puisqu'il était parti, paisiblement, au petit matin.
...
Aujourd'hui je pense souvent à l'oncle Edmond, et je regarde fréquemment le ciel où tant d'autres étoiles l'ont rejoint.
MES étoiles.

.

4 commentaires:

Fleur a dit…

Le coup du Petit Prince! Aux yeux étoilés! L'amitié du renard! mais sans avoir eu le temps d'apprivoiser l'oncle Edmond...
Je comprends mieux la phobie évoquée dans le billet précédent!

Au moins, nul besoin d'être dans le désert pour admirer les étoiles et repérer les siennes, LA sienne...

lolabebop a dit…

Chère Fleur,
Classique, Le petit prince, mais si beau.
J'aimerais, parfois, aterrir à mille miles de toutes terres habitées, et rencontrer un ange blond. Pas vous?

Fleur a dit…

Peut-être. Mais ayant trouvé mon ange à la peau couleur marron glacé (ça marche aussi avec marron chaud...), je garderai juste pour rêver des yeux verts (qui faisaient partie de la batterie de mon idéal masculin, plus jeune...): la blondeur dans la réalité m'ayant souvent paru fade, il faudrait vraiment qu'elle soit devenue pétillante pour me plaire!
(un parti pris un peu exagéré, mais pourtant sincère)

Pour l'île lointaine, ça oui, alors, grande grande envie de la trouver vraiment... Cap-Vert, peut-être? (mais le manque d'eau douce naturelle me la rendrait vite moins idéale) Non, à mille lieues de tout, ça doit être au milieu de l'océan (un peu coeur battant quand même, tant je suis habituée à toute cette foule exaspérante autour de moi), mais saurais-je y vivre, vraiment? Mes limites ô combien revisitées me gâchent même mon rêve d'isolement!

Sinon, pour moi aussi, le Petit Prince a toujours ce charme de l'enfance (amitié improbable mais dense, déchirement de la séparation, désir d'apprivoiser le monde sinon les animaux, sous-entendu les hommes aussi, enchantement d'une vie dans le désert et sur une planète très petite, portée du rêve naïf à message universel): j'adore, évidemment...

Bon w-end (parmi les humains)
Fleur

lolabebop a dit…

Quand je parlais d'ange blond, je ne pensais pas à un mâle de chair et de sang, mais à un petit prince,aussi pur que décrit par ST Ex, tout simplement. La blondeur me paraît souvent fade, à moi aussi.
Quant à s'iloler, il faut d'abord trouver son paradis terrestre...